Pierre Lemaitre a obtenu la consécration littéraire en recevant le prix Goncourt en 2013. Auparavant, il s'était distingué avec talent dans l'art du thriller. Il a publié en 2009 un roman haletant Robe de marié. Il y raconte l'histoire de Sophie, une jeune femme qui devient peu à peu folle, amnésique et criminelle. Dans sa fuite dans la clandestinité, elle exerce des petits boulots et croise la route d'un petit chef sans scrupules
- Tu viens chercher ton avance ? demande-t-il d'une voix très basse. C'est combien déjà ?
- Mille
- Ça doit pouvoir se faire..., dit-il en lui saisissant la main droite et en la portant à nouveau sur sa braguette.
Et ça se fait, effectivement. Comment ? Sophie ne se rappelle plus très bien, maintenant. Il a dit quelque chose comme : "On s'est compris, hein ?" Sophie a dû faire signe que oui, qu'ils s'étaient compris. En fait, elle n'écoutait pas vraiment, c'était comme une sorte de vertige en elle, quelque chose qui venait du fond d'elle mais qui laissait la tête toute vide. Elle aurait aussi bien pu tomber, là, de tout son poids et disparaître, fondre, s'évanouir dans le sol. Il a dû poser ses mains sur ses épaules et il a appuyé, assez fort, et Sophie s'est sentie glisser à genoux devant lui, ça non plus, elle ne sait plus vraiment. Après, elle a vu son sexe dressé s'enfoncer dans sa bouche. Elle a serré, elle ne se rappelle plus ce qu'elle faisait de ses mains. Non, ses mains ne bougeaient pas, elle n'était plus que sa bouche, simplement fermée sur la queue de ce type. Qu'est-ce qu'elle a fait ? Rien, elle n'a rien fait, elle a laissé l'homme aller et venir dans sa bouche un long moment. Un long moment ? Peut-être pas. Le temps, c'est difficile à évaluer... Ça finit toujours par passer. Si, ça elle s'en souvient : il s'est énervé. Sans doute parce qu'elle n'était pas assez active, il est entré brusquement jusqu'au fond de sa gorge, elle a reculé la tête et s'est cognée contre la porte. Il a dû prendre sa tête entre ses mains, oui, sûrement, parce que ses mouvements de hanche sont devenus plus courts, plus fiévreux. Si, autre chose, il a dit : "Serre, bordel !" En colère. Elle a serré, Sophie, elle a fait comme il fallait. Oui, elle a serré ses lèvres plus fort. Elle fermait les yeux, elle ne se souvient pas vraiment. Après...? Après rien, presque rien. La queue de ce type s'est immobilisée une seconde, il a poussé un grognement rauque, elle a senti son sperme dans sa bouche, c'était très épais, âcre, fortement javellisé, elle a laissé venir tout ça dans sa bouche, comme ça, avec ses mains elle s'essuyait les yeux, c'est tout. Elle a attendu et puis à la fin, quand il a reculé, elle a craché par terre, une fois, deux fois, quand il a vu ça, il a dit : "Salope !", oui, c'est ça qu'il a dit, Sophie a recraché une fois encore en se retenant d'une main contre le sol en ciment. Et puis, quoi... il était là de nouveau devant elle, avec un air furieux. Elle était toujours dans la même position, elle avait mal aux genoux alors elle s'est relevée mais c'était très difficile de se remettre debout. Quand elle a été debout, elle s'est rendue compte pour la première fois qu'il était moins grand qu'elle le pensait. Il avait du mal à rentrer sa queue dans son pantalon, il avait l'air de ne pas savoir comment s'y prendre et se tortillait les hanches. Après quoi il s'est retourné, il est allé à son bureau puis il a lui a fourré les billets dans la main. Il regardait au sol tout ce que Sophie avait recraché, il a dit : "Allez, casse-toi..."
15 nov. 2015
10 nov. 2015
John Giorno
L'exposition du Palais de Tokyo à Paris consacrée actuellement au poète américain John Giorno est l'occasion de lui rendre hommage et de le faire rentrer dans ce blog. En 1968, John Giorno, juché sur des rollers, distribue aux passants de Manhattan quelques uns de ses poèmes, formant ainsi la série des Street Works. Parmi ceux-ci le Pornographic Poem, écrit en 1966, présenté, une fois n'est pas coutume, dans sa version originale en anglais.
Seven Cuban
army officers
in exile
were at me
all night.
Tall,
sleek,
slender
Spanish types
with smooth dark
muscular bodies
and hair
like wet coal
in their heads
and between their legs.
I lost count
of the times
I was fucked
by them
in every conceivable
position.
At one point
they stood
around me
in a circle
and I had
to crawl
from one crotch
to another
sucking
on each cock
until it was hard.
When I got all seven up
I shivered
looking up
at those erect pricks
all different lengths
and widths
and knowing
that each one
was going up
my ass hole.
Everyone
of them
came
at least twice
and some three times.
Once they put me
on the bed
kneeling,
one fucked me
in the behind,
another in the mouth,
while I jacked off
one
with each hand
and two
of the others
rubbed
their peckers
on my bare feet
waiting
their turns
to get
into my can.
Just when I thought
they were all spent
two of them
got together
and fucked me
at once.
The positions
we were in
were crazy
but with two
big fat
Cuban cocks
up my ass
at one time
I was
in paradise.
Seven Cuban
army officers
in exile
were at me
all night.
Tall,
sleek,
slender
Spanish types
with smooth dark
muscular bodies
and hair
like wet coal
in their heads
and between their legs.
I lost count
of the times
I was fucked
by them
in every conceivable
position.
At one point
they stood
around me
in a circle
and I had
to crawl
from one crotch
to another
sucking
on each cock
until it was hard.
When I got all seven up
I shivered
looking up
at those erect pricks
all different lengths
and widths
and knowing
that each one
was going up
my ass hole.
Everyone
of them
came
at least twice
and some three times.
Once they put me
on the bed
kneeling,
one fucked me
in the behind,
another in the mouth,
while I jacked off
one
with each hand
and two
of the others
rubbed
their peckers
on my bare feet
waiting
their turns
to get
into my can.
Just when I thought
they were all spent
two of them
got together
and fucked me
at once.
The positions
we were in
were crazy
but with two
big fat
Cuban cocks
up my ass
at one time
I was
in paradise.
25 août 2015
Martin Amis
Martin Amis considéré comme l'un des écrivains britanniques majeurs depuis la fin des années 70, a publié en 1997 un court roman à l'allure de roman policier : Train de nuit. L'inspectrice Mike Hoolihan enquête sur le suicide suspect de Jennifer, la fille de son patron.
Le commissaire Tom allait à présent me livrer un nouvel élément. Je le sentais venir. Il s'est requinqué. D'un geste vif mais fébrile, il a farfouillé dans un classeur : ça ressemblait à des résultats de labo de l'institut médico-légal. Je me suis demandé comment le commissaire Tom s'y prenait pour surveiller et contrôler les découvertes de l'autopsie qui tombaient les unes après les autres.
"Les analyses ont révélé des traces de sperme dans le vagin de Jennifer et dans sa bouche, il a dit (et il lui en coûtait de ne pas me quitter des yeux). Dans sa bouche, Mike. Vous voyez ce que je veux dire?"
J'ai acquiescé. Et forcément, je me disais : Bon Dieu, on est vraiment dans une sale béchamel.
Huit jours déjà, et Jennifer qui repose toujours comme un plat de fête dans la chambre froide à l'angle de Battery Street et de Jefferson Street.
Le commissaire Tom allait à présent me livrer un nouvel élément. Je le sentais venir. Il s'est requinqué. D'un geste vif mais fébrile, il a farfouillé dans un classeur : ça ressemblait à des résultats de labo de l'institut médico-légal. Je me suis demandé comment le commissaire Tom s'y prenait pour surveiller et contrôler les découvertes de l'autopsie qui tombaient les unes après les autres.
"Les analyses ont révélé des traces de sperme dans le vagin de Jennifer et dans sa bouche, il a dit (et il lui en coûtait de ne pas me quitter des yeux). Dans sa bouche, Mike. Vous voyez ce que je veux dire?"
J'ai acquiescé. Et forcément, je me disais : Bon Dieu, on est vraiment dans une sale béchamel.
Huit jours déjà, et Jennifer qui repose toujours comme un plat de fête dans la chambre froide à l'angle de Battery Street et de Jefferson Street.
29 mai 2015
Pierre Jean Jouve
Pierre Jean Jouve est un écrivain poète dont Eros hante les œuvres. En 1928, il publie Hecate, premier opus d'un diptyque achevé par Vagadu trois ans plus tard. Les deux romans ont pour personnage principal Catherine Crachat, star de cinéma. Dans l'extrait suivant, nulle description explicite mais une conclusion indéterminée laissant toute liberté au lecteur d'imaginer les "précisions obscènes et rêvées" (citation de Marie Depussé)
Catherine était dans un train qui arrivait à Paris de je ne sais où, de Bâle, ou de Marseille. Catherine Crachat est très belle. Le train avait roulé toute la nuit et nul n'était joli à voir. Cependant il y avait deux hommes dans le compartiment de Catherine. L'un de ces hommes (fort, brun, énergique, je me souviens bien) n'avait pas fermé l'œil depuis le départ, pour ne rien perdre de Catherine somnolente.
Personne sur le quai pour Catherine ; une actrice de cinéma qui revient de tourner dans les montagnes ou près de la mer, ce n'est pas attendu. Catherine sautait sur le quai avec ses longues jambes, vivement, et disparaissait tout de suite. Le monsieur brun avait en vain essayé de la suivre. Catherine emportait un regret, ou disons, un sentiment bizarre.
Un quart d'heure plus tard dans une rame de voitures bloquées rue de Rivoli, le monsieur brun se trouvait à côté d'elle, tous deux immobiles en taxi. Tiens, c'est drôle. Au soleil il paraissait un individu bon et intelligent quelconque. Elle détournait les yeux pour ne pas "l'assassiner", mais apercevant la joie agressive de cet homme elle savait que déjà maintenant elle agissait fortement en lui. Le taxi du monsieur brun collait au sien, alors elle donnait plusieurs ordres contradictoires à son chauffeur et parvenait à semer l'amoureux (puisqu'elle n'éprouvait rien). D'ailleurs elle est peu portée à l'amour facile. Et il faut le remarquer avant d'entendre la suite de l'histoire : Catherine est généralement très froide à l'égard du plaisir, très froide, sauf les circonstances du vrai amour qu'elle a positivement connues, et même lui a-t-il fallu une sorte de grâce dans ces circonstances. Elle n'est pas maternelle et n'a aucune habitude de tendresse. Enfin ce n'est pas celle qui jouit de sa méchanceté, et pourtant souffrir et remuer la souffrance en soi et dans les autres a pour elle de la vertu, car n'est-ce-pas par ce mauvais chemin que l'on va vers une purification?
Tout de même, elle se sentait absolument sur le point de céder au monsieur brun. A quatre heures en fumant une cigarette sur son balcon chaud par-dessus la rue (c'était en été) elle eut la sensation (le désir) d'entendre le voyageur parler en bas avec la concierge Mme Pouche. Elle se pencha. A la nuit elle alla exprès s'asseoir à la terrasse d'un café sur le boulevard voisin. Et naturellement elle vit surgir le monsieur brun qui se mit à côté d'elle.
Catherine lui demanda son nom et lui dit : "Je dois passer la soirée chez une amie, voulez-vous m'accompagner? Nous finissons par nous connaître." Ils allèrent chez une dame fort bien habitant avenue de Valois, qui se nomme Marguerite de Douxmaison. Elle le présenta comme son cousin ou n'importe quoi. Là ils s'observèrent et frôlèrent pendant une heure ou deux. Puis elle le ramena chez elle. Ils parlèrent en buvant du thé de voyages, d'affaires de bourse et de sentiments de famille. Ensuite elle fit des choses assez grossières avec cet homme jusqu'au matin.
Catherine était dans un train qui arrivait à Paris de je ne sais où, de Bâle, ou de Marseille. Catherine Crachat est très belle. Le train avait roulé toute la nuit et nul n'était joli à voir. Cependant il y avait deux hommes dans le compartiment de Catherine. L'un de ces hommes (fort, brun, énergique, je me souviens bien) n'avait pas fermé l'œil depuis le départ, pour ne rien perdre de Catherine somnolente.
Personne sur le quai pour Catherine ; une actrice de cinéma qui revient de tourner dans les montagnes ou près de la mer, ce n'est pas attendu. Catherine sautait sur le quai avec ses longues jambes, vivement, et disparaissait tout de suite. Le monsieur brun avait en vain essayé de la suivre. Catherine emportait un regret, ou disons, un sentiment bizarre.
Un quart d'heure plus tard dans une rame de voitures bloquées rue de Rivoli, le monsieur brun se trouvait à côté d'elle, tous deux immobiles en taxi. Tiens, c'est drôle. Au soleil il paraissait un individu bon et intelligent quelconque. Elle détournait les yeux pour ne pas "l'assassiner", mais apercevant la joie agressive de cet homme elle savait que déjà maintenant elle agissait fortement en lui. Le taxi du monsieur brun collait au sien, alors elle donnait plusieurs ordres contradictoires à son chauffeur et parvenait à semer l'amoureux (puisqu'elle n'éprouvait rien). D'ailleurs elle est peu portée à l'amour facile. Et il faut le remarquer avant d'entendre la suite de l'histoire : Catherine est généralement très froide à l'égard du plaisir, très froide, sauf les circonstances du vrai amour qu'elle a positivement connues, et même lui a-t-il fallu une sorte de grâce dans ces circonstances. Elle n'est pas maternelle et n'a aucune habitude de tendresse. Enfin ce n'est pas celle qui jouit de sa méchanceté, et pourtant souffrir et remuer la souffrance en soi et dans les autres a pour elle de la vertu, car n'est-ce-pas par ce mauvais chemin que l'on va vers une purification?
Tout de même, elle se sentait absolument sur le point de céder au monsieur brun. A quatre heures en fumant une cigarette sur son balcon chaud par-dessus la rue (c'était en été) elle eut la sensation (le désir) d'entendre le voyageur parler en bas avec la concierge Mme Pouche. Elle se pencha. A la nuit elle alla exprès s'asseoir à la terrasse d'un café sur le boulevard voisin. Et naturellement elle vit surgir le monsieur brun qui se mit à côté d'elle.
Catherine lui demanda son nom et lui dit : "Je dois passer la soirée chez une amie, voulez-vous m'accompagner? Nous finissons par nous connaître." Ils allèrent chez une dame fort bien habitant avenue de Valois, qui se nomme Marguerite de Douxmaison. Elle le présenta comme son cousin ou n'importe quoi. Là ils s'observèrent et frôlèrent pendant une heure ou deux. Puis elle le ramena chez elle. Ils parlèrent en buvant du thé de voyages, d'affaires de bourse et de sentiments de famille. Ensuite elle fit des choses assez grossières avec cet homme jusqu'au matin.
26 janv. 2015
Antoine Volodine
Après quelques siècles passés à rédiger des notices d'utilisation d'appareils ménagers, des poèmes diphoniques en langues samoyèdes et des traités de paix pour conflits de basse intensité, Antoine Volodine s'est lancé dans l'écriture de romans. Le dernier, Terminus radieux, publié en 2014 et écrit sous influence chamanique, a reçu le prix Médicis.
Le plus jeune s'éloigne du feu et vient la retrouver. Elle l'exècre plus que les autres car maintenant que les viols ont pris un caractère non collectif il lui arrive, au lieu de tout de suite la pénétrer par le vagin, de s'accroupir au-dessus de sa tête, de lui frapper et de lui frotter le visage avec sa queue immonde et d'introduire cette queue entre ses lèvres en grognant des insanités obscènes. Or, ce soir-là, après lui avoir désentravé les chevilles, et sans doute parce qu'il obéit à une suggestion télépathique de l'oiseau, il se met, tout en lui faisant part de ses souhaits, à dénouer la corde qui lui immobilisait les poignets. Il l'insulte et, en même temps, il la supplie grossièrement de faire le rut avec entrain, pour changer. Pas comme une masse inerte. Plus comme une fille qui aime le sexe.
A droite, au dessus, dit l'oiseau.
Elle n'a eu aucune réaction jusque-là, se contentant de respirer le moins possible afin de ne pas recevoir l'haleine épouvantable du jeune violeur. Elle gémit une sorte d'approbation, un début de mot que le violeur interprète comme une approbation pâteuse, et elle se met lentement debout, donnant l'impression qu'elle réfléchit à une manière de le satisfaire, et, quand elle est plantée en face de lui, elle attend que l'oiseau lui donne des ordres.
Lève le bras comme pour amorcer une accolade, conseille l'oiseau.
Enivré par la demande qu'il a faite, le violeur ne soupçonne rien. L'oiseau l'incite à se détendre, et même à fermer les yeux pour accueillir la surprise qui l'attend; De toute façon, les ténèbres sont épaisses, et les flammes de feu de camp n'éclairent que très, très médiocrement la scène.
Le manche de l'écorçoir, reprend l'oiseau en s'adressant à Myriam Oumarik. Un peu plus à droite encore.
Myriam Oumarik tâtonne pendant une seconde.
Maintenant, ordonne l'oiseau.
Myriam Oumarik retire l'écorçoir de l'endroit où il se trouve, en effet facilement accessible et retenu par rien, et elle en promène horizontalement la lame entre les épaules du violeur, à la base du cou. Juste sous le larynx, comme on le lui dit.
Le plus jeune s'éloigne du feu et vient la retrouver. Elle l'exècre plus que les autres car maintenant que les viols ont pris un caractère non collectif il lui arrive, au lieu de tout de suite la pénétrer par le vagin, de s'accroupir au-dessus de sa tête, de lui frapper et de lui frotter le visage avec sa queue immonde et d'introduire cette queue entre ses lèvres en grognant des insanités obscènes. Or, ce soir-là, après lui avoir désentravé les chevilles, et sans doute parce qu'il obéit à une suggestion télépathique de l'oiseau, il se met, tout en lui faisant part de ses souhaits, à dénouer la corde qui lui immobilisait les poignets. Il l'insulte et, en même temps, il la supplie grossièrement de faire le rut avec entrain, pour changer. Pas comme une masse inerte. Plus comme une fille qui aime le sexe.
A droite, au dessus, dit l'oiseau.
Elle n'a eu aucune réaction jusque-là, se contentant de respirer le moins possible afin de ne pas recevoir l'haleine épouvantable du jeune violeur. Elle gémit une sorte d'approbation, un début de mot que le violeur interprète comme une approbation pâteuse, et elle se met lentement debout, donnant l'impression qu'elle réfléchit à une manière de le satisfaire, et, quand elle est plantée en face de lui, elle attend que l'oiseau lui donne des ordres.
Lève le bras comme pour amorcer une accolade, conseille l'oiseau.
Enivré par la demande qu'il a faite, le violeur ne soupçonne rien. L'oiseau l'incite à se détendre, et même à fermer les yeux pour accueillir la surprise qui l'attend; De toute façon, les ténèbres sont épaisses, et les flammes de feu de camp n'éclairent que très, très médiocrement la scène.
Le manche de l'écorçoir, reprend l'oiseau en s'adressant à Myriam Oumarik. Un peu plus à droite encore.
Myriam Oumarik tâtonne pendant une seconde.
Maintenant, ordonne l'oiseau.
Myriam Oumarik retire l'écorçoir de l'endroit où il se trouve, en effet facilement accessible et retenu par rien, et elle en promène horizontalement la lame entre les épaules du violeur, à la base du cou. Juste sous le larynx, comme on le lui dit.
2 janv. 2015
Gabriele d'Annunzio
"Ce pauvre Gabriel, si plein de génie et de spermatozoïdes" disait-il de lui-même. Gabriele d'Annunzio a fait de sa vie une oeuvre d'art et a interprété de multiples rôles. Dans le domaine de la poésie, voici une illustration laissée par ce séducteur, empereur de la luxure, qui était pour lui "la mère de tous les mystères et de tous les rêves". Le titre de ce poème trouvé dans un recueil de poésies de la période 1878-1893 édité en 1912 et reproduit en 2013 à la demande de la Bibliothèque Nationale : Invocation (sonnets).
(photo de Paul von Borax)
Bouche aimée, suave et pourtant douloureuse,
telle que déjà l'imaginèrent l'Art et mon Rêve :
forme ambigüe empruntée à un demi-dieu, au bel
Hermaphrodite adolescent ;
bouche sinueuse, humide, ardente, qui, là où
s'exaspère mon désir, alors que je suis abimé dans
un oubli profond, suces infatigablement ma vie ;
O grande chevelure éparse sur mes genoux;
pendant le doux acte; ô froide main qui répands le
frisson et qui me sent frissonner ;
vous, yeux alanguis entre les longs cils, qui
vous ouvrez à mon cri suprême et qui, tout grands,
resplendissez en me regardant mourir ;
Ah, que je meure, que je meure enfin de véritable
mort, et que ce cri soit véritablement mon cri
(photo de Paul von Borax)
Bouche aimée, suave et pourtant douloureuse,
telle que déjà l'imaginèrent l'Art et mon Rêve :
forme ambigüe empruntée à un demi-dieu, au bel
Hermaphrodite adolescent ;
bouche sinueuse, humide, ardente, qui, là où
s'exaspère mon désir, alors que je suis abimé dans
un oubli profond, suces infatigablement ma vie ;
O grande chevelure éparse sur mes genoux;
pendant le doux acte; ô froide main qui répands le
frisson et qui me sent frissonner ;
vous, yeux alanguis entre les longs cils, qui
vous ouvrez à mon cri suprême et qui, tout grands,
resplendissez en me regardant mourir ;
Ah, que je meure, que je meure enfin de véritable
mort, et que ce cri soit véritablement mon cri
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