29 sept. 2009

Zhou Weihui

Le premier roman de la Chinoise Zhou Weihui, Shanghaï Baby, est publié en 1999 et connaît un succès inattendu qui pousse les autorités à le censurer et à détruire les exemplaires non vendus. Ce fut la meilleure promotion possible pour sa carrière dans les pays occidentaux. Le livre sort en France en 2001.


Le téléphone sonne alors qu’il est en train de me déshabiller. Je décroche le combiné, c’est Tiantian.
Sa voix est lointaine mais me parvient clairement mis à part quelques grésillements et miaulements dans l’appareil. Tiantian loge dans un hôtel du bord de mer. A cause de la crise monétaire asiatique, les prix ont chuté. Les chambres et la nourriture sont maintenant très abordables. Avec deux cents yuans par jour, vous couvrez largement vos dépenses. Il dit être le seul client à aller au sauna. Il a l’air heureux. Pelote se porte bien. Demain, il compte aller à la plage et nager.
Je ne sais pas quoi lui dire. Mark m’a installée sur la table, près du téléphone. Je tiens le combiné d’une main et de l’autre son épaule. La tête penchée sur mon ventre, il lèche mon sexe à travers ma petite culotte. Je suis liquéfiée, grisée par la chatouille. Je m’efforce de paraître naturelle au téléphone. Je demande à Tiantian quelle est la température ambiante, quels types de jupes portent les filles, s’il a été faire un tour sous les cocotiers, s’il ne s’est pas fait importuner. Les gens ont toujours l’air de bonne foi et laissent rarement transparaître leurs mauvaises intentions – fais bien attention à tes effets personnels !
Tiantian éclate de rire et me dit que je suis finalement bien plus méfiante que lui, que je n’ai confiance en personne et imagine toujours le pire. Il me dit aussi que j’aborde la vie de façon négative. Les paroles de Tiantian me parviennent aux oreilles comme de petites plumes légères qui se désagrègent. Je n’ai rien retenu de ce qu’il m’a dit. Son rire dit qu’il s’adapte mieux que je ne l’aurais imaginé à un environnement inconnu. Sa voix se transforme en du Beethoven joué à la lune et vient mettre un terme à mon désordre intérieur. Je ne sens plus qu’un bonheur intense qui m’arrive par le bas. Un bonheur de couleur blanche qui vous détend les muscles et vous dilate les os. Un parfum velouté de lait pur. Tiantian me souhaite le bonsoir et m’envoie des baisers sonores à travers le téléphone.
Je raccroche. Mark a répandu son foutre sur ma jupe. Blanc, abondant, du lait pur à cent pour cent.

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