28 déc. 2009

Mario Vargas Llosa

Voici un extrait de l'Eloge de la marâtre, roman de Mario Vargas Llosa publié en 1988: une scène réunissant un jeune professeur d’orgue et son élève au charme irrésistible, étrangement proche d'un tableau du Titien visible à Madrid .





…la dame, remarquant la ferveur et l’hommage que lui rendent les yeux de ce visage imberbe et pressentant les désirs fébriles que ses formes molles et blanches éveillent chez cet adolescent sensible, ne peut laisser d’être émue et en proie à des humeurs concupiscentes.
Surtout quand le joueur d’orgue la regarde là où il la regarde. Que trouve-t-il ou que cherche-t-il au nid vénusien ce jeune artiste ? Ses pupilles vierges, que tentent-elles de percer ? Qu’est-ce qui l’oriente de la sorte vers ce triangle de peau transparente, traversé de veinules bleues comme des ruisselets, ombré du boqueteau épilé du pubis ? Je ne saurais le dire et je crois que lui non plus. Mais il y a là quelque chose qui attire son regard chaque après-midi sous l’emprise d’une fatalité ou la magie d’un sortilège. Quelque chose comme l’instinct qu’au pied du mont de Vénus ensoleillé, dans la tendre faille que protègent les colonnes galbées des cuisses de la dame, pulpeuse, pourpre et humide de la rosée de son intimité, coule la source de la vie et du plaisir. Bientôt notre seigneur don Rigoberto se penchera sur elle pour y boire l’ambroisie. Le joueur d’orgue sait que cette boisson lui sera toujours refusée car dans peu de temps il entrera au couvent des Dominicains.

1 commentaire:

  1. Qu'il est dur d'être simplement dans la contemplation. Vivre sans maître ni serviteur.

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