24 déc. 2009

Jean Genet



Après le message précédent, il m’a semblé naturel de présenter Jean Genet, une référence souvent explicite dans l’œuvre d’Hélène Cixous. Jean Genet publie Miracle de la rose en 1946. Il y décrit ses amours carcérales, ici avec le co-détenu Divers, en un lieu où brille l’auréole du condamné à mort Harcamone.



Peut-être Divers supposait-il que j’occupais mes nuits avec des rêves moins dangereux, avec son image ou l’image d’un autre amant. Il me jalousait. Il lui fallut donc beaucoup de courage ou beaucoup de lâcheté – en tous les cas, il subit une profonde agitation – pour attendre jusqu’à ce soir, pour s’imposer toute une nuit. Il ne soupçonnait pas comme j’avais travaillé. Il réussit donc à pénétrer dans une cellule de la façon que j’ai rapportée plus haut. Il s’allongea près de moi, sur le bat-flanc. Il picorait sur mon visage mille rapides baisers qui claquaient sec. J’ouvris les yeux.
La chaleur de son corps m’avait troublé. Malgré moi, je le serrai un peu. Sa présence et cet amour me délivraient du miracle que j’avais failli provoquer. A mon étreinte pourtant légère, il répondit par un geste fougueux qui ouvrit mon pantalon (on sait qu’il ne tenait que par une ficelle, elle sauta). Je quittai Harcamone. Divers était déjà à ma queue, que déjà sa bouche et sa langue travaillaient. Je quittai Harcamone. J’allongeai bien mes jambes, je dégageai mon ventre. Je trahissais Harcamone. Et l’épuisement que j’avais éprouvé par le fait de ces quatre nuits s’échappait, remplacé par un bien-être délicieux : le sentiment d’être remonté en surface après un trop long engloutissement fut prolongé.

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