11 nov. 2010

William Kotzwinkle

William Kotzwinkle est un écrivain protéiforme, encore méconnu en France. Il a abordé dans sa carrière de nombreux rivages littéraires, de la poésie aux livres pour enfants en passant par le roman noir et la littérature érotique en gardant toujours une imagination débordante et fantasque. La face érotique de l'oeuvre de Kotzwinkle se trouve dans un roman publié en 1974 Le livre d'une nuit, récit mêlant de façon étrange Athènes antique et New-York contemporain. En voici les premières lignes.



« Tu as déjà sucé une fille ? » demanda-t-elle à voix basse.
Ses jambes étaient joliment galbées, et elle ne portait pas de bas. Le fleuve murmurait dans la nuit, non loin d'eux. Assis près d'elle sur le sable de la rive, le garçon contemplait les lumières de la ville par delà la masse noire de l'eau mouvante.
« Non, jamais », répondit-il.
Il n'avait pas encore vingt ans. Sa voiture était garée au dessus d'eux, sur la route longeant le fleuve. Un policier curieux pourrait la repérer, se poser des questions ; s'il descendait la berge, il les découvrirait là. Lentement, la fille releva sa jupe sur ses jambes nues.
« Suce-moi », dit-elle.
Ecartant largement les jambes, elle souleva ses hanches ; la toison de son entrecuisse, sortant de l'ombre des arbres de la rive, scintilla au clair de lune.
La route du fleuve n'était pas déserte. Les dames les plus distinguées d'Athènes la suivaient, cheminant dans l'obscurité au gré de son tracé sinueux, pour se rendre au temple de Déméter. On y célébrait le mystère de la grande déesse de la fertilité, auquel ces grandes dames devaient assister et participer pour que la récolte soit fructueuse.
« Suce-moi », murmura la fille.
A la porte du temple, les belles Athéniennes furent accueillies par un jeune esclave, qui remarqua avec quel soin particulier elles étaient s'étaient apprêtées ce soir - les yeux brillants, les lèvres rouges, elles étaient vêtues de capes aux découpes plus audacieuses, plus impudiques que tout ce que l'on pouvait voir dans les rues d'Athènes pendant le jour.
Le coeur battant, il se pencha vers le mystère. Si les flics trouvent ma voiture, ils laisseront une contre-danse sous l'essuie-glace, et puis c'est tout.
« Oh, oui, chéri », soupira-t-elle lorsque le garçon, posant délicatement la chair tendre de sa bouche sur les petites lèvres, fit naître en elle un frisson d'extase qui monta vers son ventre et redescendit dans ses cuisses.
La grande prêtresse du temple de Déméter sentit le frémissement d'un plaisir subtil et doux parcourir son corps. La déesse était entrée en elle, et se trouvait à présent dans le temple.

1 commentaire:

  1. Je me fais aussi rare que vous mais je suis toujours heureux de découvrir de nouveaux horizons littéraires grace à vous

    RépondreSupprimer