16 févr. 2011

Philippe Djian

Philippe Djian est un écrivain populaire, édité par une maison prestigieuse dans laquelle il  a d'abord travaillé comme manutentionnaire, auteur d'un roman adapté au cinéma dans un film devenu culte, mais jamais récompensé par un seul prix littéraire.
Voici un long extrait tiré de Vers les blancs, publié en 2000. Le narrateur, l'écrivain Francis, rend visite à son ami Patrick, tombe sur Nicole, l'épouse de Patrick, de retour chez elle. La suite se déroule pendant que le cocu est occupé à l'étage.


Après coup, je peux rétablir la suite des évènements, reconstituer l'ordre chronologique qui demeura confus dans mon esprit jusqu'au lendemain matin.
Je manque de certains éléments pour commencer. Ainsi, je ne pourrais dire lequel de nous deux esquissa un geste en direction de l'autre. Je vous prie donc de m'excuser pour cette zone d'ombre et vous propose de me retrouver d'emblée aux pieds de Nicole, mes bras enserrant ses jambes et mon visage écrasé contre sa jupe.

Séquence n° 1
Il me semble que je ne dis rien, non, pas à ma connaissance, que je me contente de l'étreindre sans penser à autre chose. Il fait tout noir. Comme si l'on m'avait lancé une couverture sur la tête. Je reste ainsi, disons une minute, à la frontière de la réalité et du rêve.


Séquence n° 2
Situation identique à la précédente. A ce détail près que mon visage est en contact avec sa peau nue. J'en  déduis qu'elle a retroussé sa jupe. Elle porte un slip réalisé dans un voile microfibre, des bas et un porte-jarretelles. La tiédeur de son entrejambes m'envahit. A ce moment, je ne pense pas encore à Patrick, qui tourne en rond au dessus de nos têtes.


Séquence n° 3
La logique veut que je place ici la scène suivante, mais je n'en mettrais pas ma main à couper. Nicole se tient au portemanteau fixé au mur. Elle a posé un pied sur le guéridon où trône une composition de fleurs séchées. De mon côté, j'ai écarté son slip et je la lèche. Quelque chose me dit qu'elle a uriné il y a peu. Le sang cogne à mes tempes. Ma main libre fouille dans son soutien-gorge avec impatience. Nicole tremble.

Séquence n° 4
Nous sommes derrière le bar. Du coin de l'oeil, je surveille l'ouverture pratiquée dans le plafond, menant au bureau de Patrick. Cette fois, c'est Nicole qui me suce la queue. le temps est suspendu. Mes jambes flageolent. Elle est accroupie, genoux écartés, mes couilles dans le creux de la main. Je me suis débarassé d'un mocassin et d'une chaussette et je la branle avec le pied. Nous grimaçons de plaisir et d'effroi. Ma queue luit tel un un sucre d'orge. Je tiens à la main une poignée de Kleenex que j'ai sortie de je ne sais où.

Séquence n°5
Nous voici à présent dans le coin opposé du salon. Je n'écarte pas la possibilité de l'avoir baisée avant qu'elle ne me suce. Il y a donc à nouveau un doute quant à l'ordre des séquences. Mais bon. Nicole est accoudée au dossier du canapé. J'ai baissé son slip et je l'enfile. Elle mord un coussin de cuir en peau de buffle. Les deux mains soudées à ses hanches, je pratique un coït au rythme lent, quasi hypnotique. J'entends Patrick qui s'esclaffe au téléphone : "Hi Hi ! Ho Ho !..." Quand je suis au fond de son vagin, Nicole secoue les fesses. J'essaye d'attraper son clitoris. Je n'ose pas défaire son chignon.

Séquence n°6
Debout contre le mur, côté rue. Ses jambes sont nouées autour de ma taille. Impossible de savoir si je l'ai enculée à cette occasion ou un peu plus tôt, avant que nous ne quittions le canapé. Ou plus tard, dans la séquence numéro sept. Bref, nous titubons dans les rideaux. J'ai empoigné ses fesses. Une de ses jarretelles a sauté et son bas a glissé au-dessous du genou. Nous avons très peur. Elle me donne son sein à téter. Puis l'autre. Nous baignons dans une lumière dorée. J'ai beau appeler l'obscurité du soir, elle ne vient pas.

Séquence n°7
Une chose est sûre : j'éjacule dans la cuisine. J'entends : alors que nous sommes dans la cuisine. Mais par quel hasard? Que fabriquons nous là? Mystère ! Je me suis posé la question. En fait, il n'est pas impossible qu'il en manque un bout. Un temps, j'ai caressé l'idée d'avoir eu deux éjaculations mais je ne le crois pas. Mon raisonnement était le suivant : je la suce, elle me suce et nous allons conclure dans la cuisine. Ensuite, et ensuite seulement, nous entamons notre numéro dans le salon. Souvenez-vous : je n'ai jamais trompé Edith. Nous pouvons donc très bien imaginer qu'agissant ainsi pour la première fois de ma vie, je fusse transporté par une vigueur exceptionnelle. Moyennant quoi nous ajoutons une huitième séquence dans le salon et tout s'éclaire. Mais encore une fois je n'y crois pas. Je peux me tromper mais je n'y crois pas.
Quoi qu'il en soit, c'est la cuisine que je marque d'une pierre blanche. Le croirez-vous? Une larme a roulé sur ma joue tandis que je déchargeais. Une larme. Une vraie larme.
Mais n'anticipons pas. La cuisine. Nous y sommes. Le mobilier ne s'y prête guère. Avons donc atterri sur le carrelage, le souffle court, bousculés par l'urgence. Follement inconscient, j'ai sorti une jambe de mon pantalon pour me sentir libre de mes mouvements. Nicole m'a imité avec son slip. Deux dingues. Optons pour la position du missionnaire. Je l'empale. Elle s'accroche à mon cou, les yeux écarquillés. Bien reçu. Nous nous mangeons la bouche. Je lui mets un doigt dans le cul. Elle en met un dans le mien. Au-dessus de nous, le parquet grince. Nous nous mordons les lèvres, chacun de notre côté. J'ai sorti sa poitrine de son soutien-gorge. Ses bouts sont fermes comme du caoutchouc. J'attrape ses chevilles et lui écarte les jambes en Y. Sa vulve semble jaillir de ses gonds. Je crache dessus, l'astique avec ma paume. Elle plante ses ongles dans mes fesses. Ça me plaît. Je la retourne. Elle plonge une main entre ses cuisses et tripote nos sexes à l'aveuglette. Le mien. Le sien. Les deux à la fois. Malgré tout, c'est une course contre la montre. Elle veut me voir, elle se remet sur le dos. Se renfile ma queue séance tenante. Je suis dans son cul, non? Je me le demande. D'une seconde à l'autre, Patrick va enfoncer un couteau de cuisine entre mes omoplates. Redoublant d'audace, nous pratiquons un soixante-neuf vite fait. Bâclé. Mais quand même sympathique. Puis nous forniquons de nouveau. Pour plus de sureté, je m'assure que son trou du cul est libre car je ne veux pas d'une sodomie pour mon premier écart sexuel, mais tout est okay. Bientôt, des nappes de lave clapotent alentour. Clap ! Cloc ! J'observe Nicole s'introduisant un sein dans la bouche. Son vagin me va comme un chausson. Pour finir, elle fait de l'hyperventilation. Je plaque une main contre ses lèvres, priant pour que Patrick n'ait pas l'oreille trop fine. Quand ça vient, elle me presse les bourses avec douceur. Si bien que chacune de mes giclées menace de lui ressortir par les narines.

6 févr. 2011

Entracte

Profitons-en pour remercier les artistes qui contribuent au décor de ce lieu et entamer une folle sarabande de name-dropping :

Francis Bacon, Laurent Benaïm, François Boucher, le Caravage, Gustave Courbet, Lucas Cranach, Edgar Degas, Eric Fischl, Jean Fouquet, Jean Honoré Fragonard, Paul Gauguin, Alberto Giacometti, Giorgione, Johannes Gummp, Cornelisz van Haarlem, Keith Haring, Alfred Hitchcock, Jean Auguste Dominique Ingres, Irina Ionesco, Oskar Kokoschka, Tamara de Lempicka, René Magritte, Robert Mapplethorpe, Chris Marker, Michel Ange, Pierre Molinier, Lewis Morley, Pier Paolo Pasolini, Stephane Penchreac'h, Pablo Picasso, Pierre et Gilles, Jackson Pollock, Nicolas Poussin, Angelin Preljocaj, Jan Saudek, Egon Schiele, Chiharu Shiota, Nicolas de Stael, le Titien, Andy Warhol

et tous ceux dont je n'ai pas noté le nom !

5 févr. 2011

Geoffrey Chaucer

Les contes de Canterbury, écrits par Geoffrey Chaucer à la fin du XIVème siècle, sont considérés comme une des plus anciennes oeuvres écrites en langue anglaise. Dans le conte du meunier, deux étudiants, Nicolas et Absalon se disputent les faveurs d'Alice Lison, mariée à un charpentier. Nicolas parvient à ses fins. Son rival Absalon est alors victime d'une farce des deux amants dans la scène suivante où il se trouve à implorer la belle sous sa fenêtre.


 - Hélas, gémit Absalon, quel malheur
Qu'amour sincère soit aussi mal reçu !
Donne-moi un baiser, à défaut du reste,
Pour l'amour du Christ et aussi de moi.
- T'en iras-tu alors? demanda-t-elle
- C'est promis, ma chérie, dit Absalon.
- Prépare-toi donc, je reviens tout de suite.
Elle chuchota alors à Nicolas :
- Ne fais pas de bruit, et tu vas bien rire.
Absalon se mit à genoux, disant :
- Je me sens lancé, heureux comme un prince,
Car ce n'est là, je l'espère, qu'un début.
Ta grâce, ma chérie; ta faveur, poussin !
Elle ouvre la fenêtre en un éclair.
- Vite, dit-elle, presse-toi donc et dépêche-toi
Pour que nos voisins ne t'aperçoivent pas !
     Notre Absalon s'essuya bien la bouche.
Noire était la nuit, comme poix ou charbon.
A la fenêtre Lison mit son derrière
Et Absalon n'eut pas d'autre choix
Que d'appliquer la bouche sur le cul tout nu
Goulûment avant de se rendre compte.
Confus, il se rejeta en arrière,
N'ignorant pas qu'une femme est imberbe
Or il avait touché une touffe rêche et poilue.
-  Pouah ! s'écria-t-il, Ah ! qu'est-ce que j'ai fait?
- Hi, hi ! fit-elle en claquant la fenêtre.
Absalon s'éloigna, tout misérable.